L’oxygène médical, figurant sur la liste des médicaments essentiels de l’OMS, est vital pour traiter toutes sortes d’affections médicales. En mai 2023, l’Assemblée mondiale de la Santé a d’ailleurs reconnu son importance thérapeutique par l’adoption unanime d’une résolution visant à améliorer l’accès à l’oxygène médical tout en soulignant son rôle dans le renforcement des systèmes de santé et la concrétisation des objectifs de développement durable liés à la santé.
L’oxygène médical est nécessaire pour traiter la diminution du taux d’oxygène dans le sang, appelée hypoxémie, qui peut être due à diverses affections médicales, comme la pneumonie, la septicémie, les traumatismes ou encore les complications de l’accouchement. L’hypoxémie est une cause majeure de mortalité, en particulier parmi les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes.
Chaque année, la pneumonie est responsable d’environ 8,5 millions de cas d’hypoxémie chez les enfants de moins de cinq ans dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. La situation est alarmante, car moins de 20 % des enfants hospitalisés présentant une pneumonie sévère avec hypoxémie reçoivent l’oxygénothérapie dont ils ont absolument besoin.
Malgré l’importance de l’oxygène médical, son accès reste un défi, en particulier dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, en raison d’un sous-investissement chronique. En Afrique subsaharienne, moins de la moitié des structures de santé ont accès à de l’oxygène médical, tandis que la consommation d’oxygène moyenne par habitant y est dix fois plus faible qu’aux États-Unis ou dans l’Union européenne. Cet écart important souligne les difficultés auxquelles sont confrontés les environnements à ressources limitées pour répondre à la demande en oxygène.
L’accès à l’oxygène médical est entravé par des obstacles complexes et nombreux. Historiquement, le marché de l’oxygène se caractérise par de faibles niveaux d’innovation et relativement peu de produits mis sur le marché avant la pandémie de COVID-19. Les technologies existantes souffrent de difficultés opérationnelles, avec notamment d’importants besoins en maintenance et en alimentation électrique, et des problèmes logistiques. Ces obstacles ont entraîné des problèmes de qualité, en particulier pour les produits non entretenus, et des défis en matière de coûts, ainsi qu’un approvisionnement irrégulier et un retard d’adoption.
La qualité de l’équipement de soins respiratoires est difficile à maintenir en raison de l’impossibilité d’appliquer des méthodes d’assurance qualité traditionnelles dans de nombreux endroits et de la pénurie de professionnels qualifiés. Cette maintenance inconstante met en péril la pureté de l’oxygène et affecte les soins aux patients.
La question des coûts est également une problématique majeure, en particulier dans les régions à faible revenu où d’importants investissements dans les infrastructures, la consolidation du marché et les dépenses liées au transport font augmenter le prix de l’oxygène (surtout de l’oxygène liquide). Ces charges financières restreignent la capacité des structures de santé à fournir une oxygénothérapie essentielle.
L’approvisionnement et la distribution sont confrontés à d’importants défis, notamment dans les environnements éloignés et aux ressources limitées. Ces régions dépendent souvent de l’échange de bouteilles d’oxygène, inefficace à cause de l’approvisionnement inconstant et du manque de réseaux de canalisation des gaz médicaux. En outre, l’obtention de pièces de rechange peut s’avérer problématique, ce qui entraîne une sous-utilisation des ressources disponibles en oxygène.
La demande et l’adoption de produits liés à l’oxygène sont contraintes par des problèmes opérationnels comme la maintenance et le besoin en alimentation électrique. Même s’il existe des technologies avancées, elles parviennent sur le marché avec lenteur et les circuits d’adoption sont obscurs peu clairs, entraînant une sous-utilisation des produits et une demande non satisfaite.
L’innovation dans les technologies de production et de distribution d’oxygène est limitée. L’introduction de nouvelles technologies nécessitant moins de maintenance pourrait significativement améliorer l’accès mais la lenteur du rythme d’innovation limite leur disponibilité.
Il est crucial de lever ces obstacles pour s’assurer que les structures de santé du monde entier bénéficient de l’oxygène nécessaire pour fournir des soins de qualité.
La pandémie de COVID-19 a mis en lumière les disparités mondiales critiques dans l’accès aux ressources médicales et les incohérences flagrantes dans la disponibilité de l’oxygène entre les pays à revenu élevé et les pays à revenu faible ou intermédiaire.
En réaction, les investissements dans l’oxygène médical se sont multipliés ces quatre dernières années. Depuis 2020, les pays ont rapidement introduit de grands volumes d’équipements de soins respiratoires pour faire face à l’urgence, cette riposte très attendue allant bien au-delà du COVID-19. Dans le même temps, l’industrie privée, les organismes caritatifs et les institutions d’éducation supérieure ont reconnu les lacunes de l’innovation et ont développé de nouveaux produits pour répondre aux défis persistants de conception.
Unitaid a récemment développé un rapport sur le panorama de l’innovation en matière d’oxygène médical (Medical Oxygen Innovation Landscape) qui décrit tout un vivier de technologies émergentes et de modèles économiques. Les systèmes émergents de production d’oxygène à grande échelle et de canalisation pour les gaz médicaux font partie des secteurs de produits que ce rapport désigne comme des opportunités de combler des lacunes essentielles. Ce rapport identifie aussi des modèles économiques pilotes et potentiels capables de résoudre des difficultés complexes de distribution. Il faut désormais poursuivre les investissements pour consolider les progrès faits ces dernières années et s’assurer que les investissements et les innovations datant de l’ère du COVID-19 se maintiennent, se déploient à grande échelle et permettent un plus large accès à l’oxygène.
Après avoir investi considérablement pour améliorer l’accès à l’oxygène, Unitaid reconnait que les investissements doivent se poursuivre pour catalyser l’innovation continue de produits et faire évoluer les modèles économiques afin d’obtenir un accès constant au marché. Les données probantes suggèrent que l’amélioration des systèmes de production et de distribution d’oxygène pourrait réduire de moitié les taux de mortalité de la pneumonie infantile en milieu hospitalier, soit une proposition d’optimisation des ressources comparable aux programmes de vaccination. Étant donné cet important impact potentiel, Unitaid lance un appel à propositions qui se concentre sur les objectifs suivants :
- Faciliter l’introduction des nouvelles technologies liées à l’oxygène dans les pays à revenu faible ou intermédiaire : évaluer et favoriser les innovations récentes dans les systèmes de production de grande capacité et les réseaux de canalisation des gaz médicaux, peu adoptés par les pays à revenu faible ou intermédiaire, pour mieux évaluer leur faisabilité et établir les cas d’utilisation permettant d’optimiser aux mieux les ressources en conditions réelles.
- Élargir l’accès aux solutions liées à l’oxygène avec de nouveaux modèles économiques : piloter et évaluer de nouveaux modèles économiques pour pérenniser les investissements de la pandémie et optimiser les équipements de soins respiratoires, y compris en identifiant les canaux permettant leur future adoption.