Aucun continent n’est plus lourdement touché par le paludisme et les autres maladies transmises par les moustiques que l’Afrique ; voilà pourquoi celle-ci a assumé un rôle de leadership à l’avant-garde de la recherche de solutions pour l’avenir. L’Agence de développement de l’Union africaine-NEPAD (AUDA-NEPAD) a été mandatée par les chefs d’État de l’Union africaine pour appuyer la prise de décision politique, le plaidoyer, l’acceptation sociale et le développement des capacités réglementaires en faveur de la science, de la technologie et de l’innovation à travers le continent – de l’élaboration de stratégies intégrées de lutte antivectorielle jusqu’à l’exploration d’outils de lutte antivectorielle basés sur l’ingénierie génétique.
C’est dans cet esprit de leadership continental et d’anticipation que nous accueillons ce rapport de synthèse d’Unitaid, « Moustiques génétiquement modifiés : technologie et accès », une ressource qui arrive à point nommé alors que l’Afrique s’efforce de combattre les maladies à transmission vectorielle de manière innovante et fondée sur des données probantes. L’autonomisation, la coordination régionale et le leadership scientifique de l’Afrique sont des considérations essentielles dans l’exploration des outils innovants, comme les moustiques génétiquement modifiés. Les organes de haut niveau de notre Union ont lancé un appel à un engagement proactif à l’égard de ces outils. En 2018, le Groupe de haut niveau de l’Union africaine sur les technologies émergentes a identifié les moustiques modifiés par forçage génétique parmi les options prometteuses de lutte contre le paludisme dans le cadre de la lutte antivectorielle intégrée, une recommandation subséquemment approuvée par les ministres africains et le Conseil exécutif de l’Union africaine. Suivant ces lignes directrices, l’AUDA-NEPAD, avec des partenaires régionaux comme l’Organisation ouest-africaine de la santé, a établi des plateformes et des cadres en prévision du déploiement des moustiques génétiquement modifiés. Par exemple, le programme de gestion des vecteurs en Afrique de l’Ouest réunit des organes de réglementation de la santé, de la biosécurité et de l’environnement, des comités d’éthique et des experts en lutte contre le paludisme de nombreux pays, dans une approche « Une seule santé » de gouvernance régionale multisectorielle. Avec ces initiatives, nous anticipons les difficultés réglementaires et techniques afin que les pays africains puissent pleinement tirer parti des bienfaits des moustiques génétiquement modifiés lorsque le temps sera venu de les déployer.
Ce travail en amont – élaboration de lignes directrices harmonisées sur la biosécurité, l’éthique et l’évaluation des risques, renforcement des capacités institutionnelles – témoigne de la volonté de l’Afrique de tenir à jour la réglementation et de partager les responsabilités à l’ère du génie génétique. Nous reconnaissons également le rôle catalyseur de nos partenaires mondiaux en matière d’innovation pour la santé. Unitaid, en particulier, a joué un rôle déterminant en ouvrant la voie à des innovations équitables et à des initiatives orientées sur l’accès. Le modèle d’Unitaid – identifier les solutions de santé transformatrices et lever les obstacles du marché pour les rendre accessibles à ceux et celles qui en ont le plus besoin – a conduit au déploiement de plus de 100 produits de santé vitaux dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. En commanditant ce rapport de synthèse, Unitaid continue de démontrer sa volonté de développer et d’introduire de nouveaux outils de lutte antivectorielle, comme les moustiques génétiquement modifiés, dans une optique d’équité et d’accès. Depuis 2016, Unitaid a investi considérablement dans le développement d’innovations prometteuses en lutte antivectorielle et dans la cartographie du paysage des solutions transformatrices.
Le présent rapport est plus qu’une synthèse technologique sur les moustiques génétiquement modifiés, il est une feuille de route pour leur application concrète dans le monde réel – de manière sûre, efficace, responsable, abordable et durable – au service des objectifs de santé publique.
Le développement futur des moustiques génétiquement modifiés en Afrique sera guidé par les principes de sécurité, d’inclusion et de gouvernance anticipative. Pour que ces outils soient sans danger et acceptés, nous devons inclure nos communautés à toutes les étapes. Pour l’AUDA-NEPAD, la participation communautaire et la transparence ne sont négociables sous aucune condition. Nous avons appris qu’en sollicitant la participation des parties prenantes locales dès le début – écouter les communautés, répondre à leurs préoccupations et respecter les connaissances des gens du pays – nous obtenons la confiance et l’acceptabilité sociale nécessaires pour que les interventions de moustiques génétiquement modifiés soient efficaces et durables. Nous croyons tout autant en la cohérence politique : l’Union coordonne les politiques en matière de santé, d’environnement et d’agriculture, afin que les nouveaux outils complètent les interventions existantes et que les cadres réglementaires fonctionnent en harmonie. Notre approche collaborative avec les États membres et les communautés économiques régionales met l’accent sur la consultation et le consensus.
Conscients que les moustiques ignorent les frontières, c’est à l’échelle régionale et continentale que nous devons coordonner la riposte. En investissant dans la gouvernance anticipative – évaluations préliminaires des risques, orientations éthiques, préparation juridique – l’Afrique prend les devants pour préparer un avenir où les moustiques génétiquement modifiés pourront être intégrés de manière sûre et inclusive dans les stratégies de santé publique. Il s’agit de nous assurer que l’avancement de cette technologie à toutes les étapes, depuis la recherche jusqu’à l’utilisation sur le terrain, se fasse en adéquation avec nos priorités de santé publique et nos valeurs éthiques. Unitaid publie ce rapport de synthèse à un moment crucial. Il procure une vue d’ensemble du domaine et met en lumière les moyens de traduire les innovations en impact. Les gouvernements africains, les bailleurs de fonds et les partenaires de recherche sont encouragés à utiliser ce document comme une référence en matière d’investissement collaboratif soutenu par des actions à l’initiative de l’Afrique. Les parties prenantes africaines doivent s’en inspirer pour mettre en œuvre des efforts concertés – qu’il s’agisse du financement de la recherche et du développement stratégiques, du renforcement des infrastructures réglementaires ou de la préparation de déploiements pilotes basés sur des données probantes et le consentement des communautés. En agissant ensemble, nous pouvons accélérer le développement de ces outils et faire en sorte que l’Afrique en tire parti et en favorise l’utilisation responsable.
En effet, alors que l’Afrique progresse collectivement dans la lutte contre les maladies à transmission vectorielle, la collaboration élargie entre les parties prenantes publiques et privées constitue un pas en avant d’une importance capitale. L’utilisation de moustiques génétiquement modifiés ne remplira ses promesses que dans le partenariat : entre les nations, entre les scientifiques et les communautés et entre l’Afrique et ses alliés dans le reste du monde. Par cet avant-propos, l’AUDA-NEPAD réitère son engagement envers la gouvernance inclusive, le développement et le partenariat mondial par l’établissement de politiques fondées sur des données probantes. Le cheminement vers le déploiement de moustiques génétiquement modifiés symbolise le cheminement général de l’Afrique en science et en innovation : nous assumons la responsabilité de nos solutions, nous travaillons ensemble et nous négocions avec le monde à nos conditions. Avec vision et vigilance, nous garantirons que ces nouveaux outils de lutte antivectorielle serviront à sauver des vies et à préserver la bonne santé de nos populations. Ensemble, faisons en sorte que l’innovation se transforme en espoir – et l’espoir en un impact durable pour l’Afrique et le monde entier.